Aux héroïnes du quotidien

Elle peut passer à travers n'importe quoi.

Peine d'amour.

Amitiés terminées.

Combats familiaux dysfonctionnels.

Chaque fois que le monde la blesse, elle sourit et continue comme si rien ne se passait.

Comme si elle était parfaitement bien.

Comme si son cœur était incassable.

Elle a l'air forte.

Mais elle ne se sent pas forte.

Elle se sent comme si elle vivait un mensonge, comme si tout le monde lui donnait plus de crédit qu'elle ne le mérite.

Après tout, tout le monde pense seulement qu'elle est forte, parce qu'ils voient un seul côté d'elle.

Ils la voient pendant la journée, quand elle a assez d'énergie pour faire semblant.

Mais ils ne la voient pas la nuit, seule dans sa chambre, quand elle est trop fatiguée pour dépasser ses problèmes.

Elle ne laisse jamais personne l'attraper quand elle est vulnérable.

Quand elle a envie de pleurer, elle repousse les larmes loin jusqu'à ce qu'elle ait une chance d'aller à la salle de bain pour laisser couler l'eau.

Quand elle est bouleversée, elle va inventer une excuse pour annuler ses plans, et personne ne se rend compte que quelque chose ne va pas.

Elle souffre en silence.

Elle ne voit pas le besoin de partager sa misère.

Ses amis la considèrent comme une fille drôle.

La pétillante.

Ils viennent à elle avec leurs problèmes.

Ils s'attendent à ce qu'elle sache quoi faire.

Alors elle hoche la tête et offre de la consolation quand ils se plaignent de leur vie presque parfaite, même si elle veut crier qu'ils ne savent pas quels sont les problèmes réels.

Qu'elle a affaire à quelque chose d'un million de fois pire.

Mais elle ne se laisse pas exploser.

Elle écoute.

Elle comprend.

Elle essaie d'être une bonne amie.

Et quand elle est en public, quand les gens sont autour, il n'est pas si difficile de mettre de côté ses problèmes.

Elle s'est habituée.

Mais la seconde qu'elle obtient dans sa voiture, la seconde où elle est hors de vue du reste du monde, tous ses problèmes viennent s'écraser autour d'elle.

Elle déteste les longs trajets seule dans la voiture, tout autant qu'elle déteste les pensées de minuit. Elle déteste être coincée dans son propre esprit parce que c'est un endroit dangereux.

C'est un endroit où elle est convaincue qu'elle est derrière dans la vie.

Elle n'a pas réussi.

Elle est moche.

Elle est stupide.

Elle va mourir seule.

Elle va mourir sans réaliser aucun de ses rêves.

Même si elle semble forte, même si elle est forte, ses craintes ne la laisseront pas seule.

Elles la suivent tous les soirs, dans sa chambre, dans ses rêves.

Et elles la font se sentir petite.

Sans valeur.

Inutile.

Elle déteste que le reste du monde la voie comme une chose, comme une belle femme indépendante, alors qu'elle se voit comme autre chose.

Elle ne se rend pas compte qu'elle est aussi forte que le fer, parce qu'elle continue.

Elle est forte, parce qu'elle a encore de l'espoir.

Elle est forte, parce qu'elle est capable de sourire à travers la douleur.

Elle est forte, parce qu'elle est encore vivante, même si elle est témoin de combien ce monde peut être cruel.

(Source : www.ayoye.com)